Il y a un désert dans le mot désir.
J’ai décidé de l’explorer.
J’ai décidé de l’habiter.
Il y a un désert dans le mot désir.
J’ai décidé de l’explorer.
J’ai décidé de l’habiter.
Michel Dunand
Je fais souvent ce rêve où je suis devant ma maison idéale.
C’est plutôt un spacieux chalet de montagne, légèrement isolé, doucement éclairé.
Le craquement de son bois dialogue avec l’épaisse langue de neige sur le toit.
Dans ma main, réunies en trousseau, toutes les clés que mes aventures passées m’ont permis de récolter. Plus de dragons énervés, plus de pièges ni d’énigmes à solutionner. Seule, calme, je me tiens debout devant la porte d’entrée. Le dernier gond rouillé semble prêt à sauter, il pourrait presque tomber en poussière si je me risquais à l’effleurer.
Il m’en a fallu du temps pour me détourner de toutes les maisons auxquelles je croyais ressembler. J’ai visité les plus modestes sans réussir à m’en contenter, envié les plus flambantes, rutilantes, mieux équipées. J’ai cru trouver ma place dans celles de quelques autres et me raconter que c’était une opportunité. Une fois dedans, elles me paraissaient souvent vaniteuses, lisses, étouffantes ou mal dimensionnées à mon intériorité.
Désormais je suis là. Devant celle que je sais être faite pour moi.
J’ai le plan, les clés, le temps. Il n’y a plus qu’à franchir un pas.
Un seul.
Pourtant… je reste sur le seuil.
Habitués à juger nos rêves, nous sommes entrainés à nous en croire indignes, voire à nous en passer. Alors, ils sont devenus timides. Ils essaient tant bien que mal de se contorsionner pour traverser nos nombreux contrôles de sécurité. À force de batailler, ils deviennent petits, étriqués, ils sortent bien alignés tels des petits pains conditionnés dans les usines où ils sont préfabriqués, formatés, mis sous vide et bien emballés.
Il est urgent de réapprendre à rêver en illimité.
À l’échelle individuelle, chaque rêve une fois accompli, permet à ta vie de se dérouler selon un plan bien établi.
Mais avant de nous attaquer à l’appel du cœur – un bon rêveur en a toujours peur – tournons-nous vers sa petite sœur : l’envie.
L’envie est au besoin ce que le rêve est au chemin. Un moyen d’avancer vers lui.
L’envie, c’est l’étincelle qui allume toute ta vie.
Comment espérer entendre nos rêves si nous n’écoutons pas nos envies ?
Si lorsqu’elles se présentent, nous les balayons d’un revers de main sous prétexte qu’elles ne collent pas avec l’idée préconçue de ce qui serait bon pour nous ?
À nous de leur réserver bon accueil, de les laisser nous révéler cette version de nous-même infiniment réactualisée. Tu mérites mieux que la pâle copie de rêves prédigérés par une société éreintée, ou de ceux hérités par les générations qui t’ont précédé.
Savais-tu que lorsqu’on gratte une corde de guitare dans un magasin de musique, les autres guitares se mettent à résonner à l’identique ?
C’est ce qui se produit quand tu vibres ta vérité, tu réveilles celle des autres à côté.
Ose suivre tes envies, laisse-les te guider de leurs mélodies.
Quand le chemin est beau, on se demande moins où il mène.
Et si ça te tracasse quand même…
Ne t’inquiète pas.
Ton rêve est là.
Il ne va nulle part, il t’attend.
Comme une pierre au fond d’un étang.
Chacun de nous est le porteur d’un rêve, pour lui-même comme pour toute l’humanité.
L’exposer à la lumière, aux vents et marées, c’est faire de ce rêve le souvenir d’un futur réalisé.
Je rêve d’un monde où nous serons des centaines de milliers à franchir le seuil de nos maisons éclairées.
Sarah Morisse